lundi 8 décembre 2008

La bouche sur l'air, épisode six et demi

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Cannelle était écrit sur la bouteille
alors elle s’est laissée tenter. Tête contre le rocher et pieds dans la mer. La baie s’appuie contre son corps. Elle y trempe doucement le savon. Elle attend ses voyages pour utiliser cet inutile et merveilleux reposoir. Elle a brutalement envie de relire le carton d’invitation. Ses cheveux laissent des gouttes blanchâtres sur son sac à main. C’est lui qui l’a invitée, elle parmi tant d’autres dont il se contrefout. Pendant les petits fours et les détartrés de la grande vacuité mondaine, il ira fumer sa cigarette un étage plus bas. Elle sait que les promontoires l’agacent, surtout Monaco. Elle se fera toute petite.

A la surface, la petite carte. Bientôt lui.
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Bientôt la mort
de l’amour. Ce serait si simple, comme un nœud qu’on défait autour du cou, comme on enlève son costume de pingouin quand la fête est terminée. Du noir et blanc pour des feux qui défient la blancheur du soleil et des étoiles, qui dérangent l’obscurité de la nuit. Si peu de couleurs. Il ne veut rien faire pour dénoter, rien faire pour se distinguer, l’artificier. Juste faire jaillir un peu de ces bruits bariolés hors de leurs boîtes, les commenter si nécessaire. Il veut rentrer se coucher, quitter ce promontoire. Ses cheveux dans sa bouche, pas de cigarette.
Plus jamais
de promontoire, encore plus de cigarettes. Mourir à petit feu. Feufeu. Elle adorait répéter les mots deux fois, comme. Le noir. La foule lâche ses commentaires. C’est l’heure de la fuite.

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Comme un bruit de bois
froissé. Mes fesses contre la balustrade, basse à donner envie de plonger. Mes seins tendus dans l’ennui de cette nuit. Trop de regards sur moi, surtout les yeux des femmes. Entre les bruits familiers du gotha, talons, gloussements, bulles de champagne, cric-craac, cric-craac. Cric-craac ne s’est pas arrêté quand les feux ont commencé à siffler, puis se taire et enfin exploser de couleurs et de poudre en même temps que les têtes se renversaient, les bouches s’ouvraient et les oh ! ah ! cherchaient à récupérer le devant de la scène. Comme je devais être loin de ce réel tant de fois mâché pour entendre cric-craac.
Quand sa voix a arrêté la boîte d’allumettes de tourner dans sa poche, je me suis retournée. Mèche incontrôlée. Beauté de la lèvre supérieure. Immense main tendue pour recevoir les félicitations, aussitôt remise à l’abri de la moiteur monégasque. L’artificier, qui réveille les enfants et calme les marionnettes du monde. Une énergie maximale dans mon espace. Plus rien ne pouvait m’empêcher d’aimer.

Je lui demandai du feu.

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